L’anxiété a tendance à se généraliser au sein de notre société. Propre à l’être humain, elle a toujours été présente dans toutes les civilisations, néanmoins, les objets de l’anxiété évoluent selon les moments de vie et les actualités. Nous avons tous des craintes, des peurs, des anxiétés, mais à quel moment une personne bascule-t-elle dans la pathologie ? Quel accompagnement existe pour les personnes anxieuses ? Cet article viendra vous éclairer sur toutes ces questions et vous apportera quelques clés pour réduire l’état d’anxiété.
Enfin, nous vivons collectivement quelque chose d’assez anxiogène avec cette crise sanitaire. Je viendrai, à la fin de l’article, vous fournir des stratégies adaptatives pour faire face à l’anxiété générée par cette situation de confinement généralisé.
Qu’est ce que l’anxiété ?
L’anxiété est une réaction mentale créée par notre système de pensées. C’est une anticipation négative de l’avenir, l’anxiété peut être personnelle, professionnelle, sociale ou même sociétale . Elle est une manière adaptative de gérer les situations qui peuvent être dangereuses, ainsi, il est tout à fait normal d’être un peu anxieux dans une situation donnée. Il y a des personnes plus ou moins anxieuses par nature, mais Il existe des événements qui poussent l’être humain à être anxieux et ça se justifie: attentats, coronavirus, confinement, changements de vie, études, avenir professionnel, avenir affectif.
Cependant, lorsque cette anxiété n’est pas adaptée, elle ne nous aide pas à affronter de manière satisfaisante les situations et devient un ennemi. Plus concrètement, lorsque l’anxiété engendre une limitation de la liberté individuelle , lorsque les activités sociales, professionnelles, familiales sont affectées ou compromises, on parlera d’anxiété pathologique.
Un tiers de la population souffre ou a souffert d’un trouble anxieux. On parle de trouble anxieux lorsque l’anxiété devient un problème, lorsqu’elle nuit au fonctionnement. Il y a des personnes qui sont comme paralysées par leur peur et qui vont éviter des situations.
Comment se vit l’anxiété ?
L’ingrédient clé dans les troubles anxieux c’est l’interprétation, c’est-à-dire qu’une personne va percevoir du danger dans une situation donnée, ce qui va générer de l’anxiété. Comment se développe-t-elle vers une pathologie chronique ? Le 2ème ingrédient clé est l’évitement : lorsqu’on se met à éviter de manière systématique ce qui nous fait peur , on se retrouve dans un piège. L’évitement est un piège car elle referme l’anxiété sur elle-même. La personne anxieuse va se mettre à cogiter, à s’interroger et répondre systématiquement à ses questions de manière négative, entrainant des troubles du sommeil, de l’irritabilité, du négativisme, etc.
Il y a une caractéristique qui réunit les personnes qui souffrent d’un trouble de l’anxiété : il existe une sorte de sous-estimation de ses propres capacités à faire face à des situations différentes. C’est le sentiment de ne pas avoir assez de moyens, « d’armes » pour pouvoir affronter de telles situations. En corrélation à cela, il y a une surestimation des situations qui sont à craindre. La combinaison de ces aspects « je n’y arriverai pas » et « je vois du danger partout » est à l’origine des différentes formes de l’anxiété.
Quels sont les troubles anxieux ?
Il y a plusieurs troubles anxieux :
- l’anxiété généralisée (TAG) : C’est la tendance à se faire du soucis pour tout (inquiétudes financières, la santé, etc.) C’est un état d’alerte permanent d’anxiété, durant au moins 6 mois. Cette anxiété n’est pas liée à un objet ou à une situation précise. Les symptômes physiques associés sont les tensions motrices : fatigue, tension musculaire, agitation ou surexcitation ; l’hypervigilance : difficultés de concentration, troubles du sommeil, irritabilité, mains froides et humides, bouche sèche, sueurs, nausées ou diarrhée, besoin d’uriner fréquent, difficultés à avaler ou sensation de boule dans la gorge, tremblements, contractions, douleurs, endolorissement musculaire, syndrome du côlon irritable, céphalées. L’anxiété généralisée peut avoir un fort impact sur la vie quotidienne et s’accompagner d’un état dépressif.
- le trouble panique : C’est la survenue brutale d’une peur intense, d’un sentiment de mort ou de catastrophe imminente, de perte de contrôle de soi. Les symptômes physiques et comportementaux associés sont : palpitations, battements de cœur ou accélération du rythme cardiaque, transpiration, tremblements ou secousses musculaires. Sensations de « souffle coupé » ou impression d’étouffement, douleur ou gêne thoracique, nausée. Sensation de vertige ou impression d’évanouissement. Déréalisation (sentiments d’irréalité) ou dépersonnalisation (sentiment d’être détaché de soi). Peur de perdre le contrôle de soi ou de devenir fou, peur de mourir. Sensations d’engourdissement ou de picotements, frissons ou bouffées de chaleur. Une attaque de panique dure environ 30 minutes et évolue en fonction de la cause et du contexte. Ces crises peuvent être spontanées, réactionnelles à un traumatisme ou une prise de toxiques, accompagner une maladie organique en particulier aiguë, ou survenir dans un état psychopathologique particulier (dépression, psychose, démence)
- l’état de stress post-traumatique : survient lorsque le stress engendré par une situation dans laquelle on a eu peur de mourir ou dans laquelle on a vu une personne en danger de mort, a des conséquences physiques et psychiques sur du long terme.
Les phobies :
Une phobie est une peur irraisonnée, intense et spécifique à un objet ou une situation. Les phobies sont très fréquentes dans la vie psychique normale. Elles deviennent pathologiques par leur intensité et leur retentissement sur la vie de la personne. Les phobies s’accompagnent de conduites d’évitement de l’objet ou de la situation, et/ou de conduites qui rassurent (conduites contraphobiques). La personne a conscience du caractère absurde de sa peur et en souffre. Ces situations sont vécues avec une grande souffrance ou sont évitées. Comme pour les autres troubles anxieux, le retentissement sur la vie quotidienne peut être important.
- les phobies spécifiques : Peur irraisonnée et intense d’animaux (souris, araignée), d’objets (couteaux, ciseaux, plume, sang), des hauteurs (vide), des transports (avion, train, auto), des lieux clos (claustrophobie), peur de l’eau, du noir etc…
- la phobie sociale : la peur d’être en public, parler en public. Peur irraisonnée et intense des situations où l’on est exposé au regard d’autrui (peur de rougir, trembler, parler, manger ou vomir en public, peur des examens)
- la dysmorphophobie : Préoccupation pour un défaut imaginaire de l’apparence physique. Si un défaut physique est apparent, la préoccupation est manifestement démesurée. La personne peut passer beaucoup de temps à examiner son « défaut » ou à se « soigner ». Elle tente ainsi de diminuer son anxiété mais l’effet est souvent inverse. Cela amène parfois à essayer d’éviter de se voir en enlevant tous les miroirs.
- l’agoraphobie : la peur des grands espaces ou dans des espaces dans lesquels il y a peu de possibilités d’atteindre une sortie (cinéma, avion, magasin avec beaucoup de monde). des espaces découverts et de la foule, ou de toute situation dont on ne peut s’échapper facilement (être seul loin de son domicile, être sur un pont…). Ces situations sont vécues avec une grande souffrance ou sont évitées.
- les trouble obsessionnel compulsif (TOC) : Les TOC se manifestent par des pensées dérangeantes, répétitives et incontrôlables, appelées « obsessions idéatives« , qui causent une forte anxiété. (ex : la crainte d’être contaminé , de faire un acte irrationnel en public, peur de certains mots , des chiffres, des objets, des idées en référence à la morale, la vie, la mort, la religion, l’ordre, la sexualité). La conscience de la personne est envahie par une idée incontrôlable qui l’épuise dans une lutte anxieuse pour la neutraliser. L’obligation pour pouvoir contrôler l’anxiété liée à cette peur engendre de faire des gestes, des comportements ritualisés, irraisonnés, appelés « compulsions » (ex : se laver les mains plusieurs fois pour éloigner la crainte d’être contaminé). Cela reste le plus souvent au niveau de la pensée, de l’intention, et les passages à l’acte sont exceptionnels. Les compulsions qui s’imposent à la personne de façon permanente ont un caractère magique et conjuratoire. Ils accompagnent souvent les obsessions et les compliquent : compulsion à compter, suites de mots, rituels de vérification, de lavage, de la toilette, de l’habillage et du déshabillage, du coucher etc. Souvent l’entourage doit y participer pour garantir leur exécution et leur efficacité.
Les personnes qui souffrent de troubles anxieux sont conscientes du côté disproportionné et illogique de leurs inquiétudes, de leur peur, ainsi leur participation active au traitement est fondamentale. Souffrir d’un trouble anxieux est corrélé avec une perte de liberté car on évite pleins de situations parce qu’on en a peur. Un des moyens pour pouvoir se soigner est de reconquérir un peu de terrain et affronter les situations qui nous font peur. C’est la personne elle-même qui devra le faire. Ainsi, sa participation active va être essentielle pour la réussite d’un traitement.
Soins et accompagnements :
En fonction des situations, le traitement des troubles anxieux peut comprendre des conseils d’hygiène de vie, de la relaxation, une psychothérapie et/ou un traitement médicamenteux. Aussi, l’échange au sein de groupes de paroles avec des personnes ayant les mêmes problèmes peut être d’une grande aide.
Petits conseils vers une régulation des troubles anxieux :
- Adopter une meilleure hygiène de vie : la diminution de la consommation de café, l’arrêt de la consommation d’alcool et de tabac, ainsi que la pratique régulière d’une activité physique (marche, course, natation ou cyclisme) sont recommandées.
- Faire de la relaxation améliore le contrôle émotionnel, aide à se déconnecter de son environnement et se concentrer sur soi, permet d’éviter l’accumulation des tensions musculaires et psychologiques. Pour se relaxer il faut s’entraîner à se concentrer en étant détendu musculairement. La relaxation peut être associée à une thérapie comportementale.
Quelles psychothérapies ?
On sait que certains types de psychothérapies sont efficaces pour les traitements des troubles anxieux :
- Les « TCC » thérapies cognitivo- comportementales ont 60 à 80 % de réussites selon le trouble. Il s’agit d’aider la personne à modifier ses comportements par des « exercices d’exposition » afin de réussir à affronter ses peurs en vu de cesser d’éviter. Cela se fait par le biais d’exercices à effectuer au quotidien. Ce sont des apprentissages qu’il faut répéter de manière très progressive.
- On va agir aussi sur le cognitif ou les pensées pour les assouplir.
- Durée : quelques séances à quelques mois, voire plus selon la gravité du trouble.
- Traitements pharmacologiques : parfois ils sont utilisés en combinaison avec les psychothérapies
- Suivis psychothérapeutiques : Traitement qui se fait par des entretiens réguliers, individuels ou en groupe, avec un(e) psychothérapeute. La durée du traitement varie de quelques mois à quelques années. Tous les problèmes de type anxieux peuvent en bénéficier, quelle que soit la souffrance psychique exprimée.
- Identifier les symptômes du trouble psychique
- Favoriser l’expression des sentiments et des émotions pour retrouver confiance en soi
- Dénouer les conflits inconscients à l’origine des troubles
- Retrouver confiance en soi et renforcer les capacités de la personne.
Gérer son anxiété en temps de crise du coronavirus :
Face à cette crise sanitaire, certaines personnes adoptent parfois des comportements irrationnels générés par le stress qui explose. L’impuissance engage le moteur de la peur, du stress et de l’anxiété. Ainsi, il est important d’apprendre à réguler son stress en développant des ressources pour affronter les événements.
Comment développer sa maitrise personnelle pour faire face à l’imprévu et ne pas se sentir impuissant ?
- Evacuer régulièrement les tensions du corps : avoir une bonne hygiène de vie, maintenir une bonne respiration pour fluidifier les différentes tensions présentes dans le corps au quotidien, faire une activité physique (yoga, pilate, course à pied), faire des activités qui nous font plaisir (rire, lire, dessiner, pratiquer un instrument de musique)
- Agir sur le mental et sur les pensées : accéder à ses pensées, identifier les déclencheurs de l’anxiété ( quelles pensées nous font du bien et quelles sont celles qui ne me font pas de bien). Aller chercher le positif et faire taire les pensées toxiques et négatives.
- Continuer à cultiver la joie : la joie n’est pas forcément toujours extérieure, il faut aller la chercher en soi, la stimuler (ex : la bienveillance vis-à-vis de soi-même, la réciprocité de services rendus, la solidarité, la politesse, donner du sens à sa vie à travers la lecture, les documentaires, les podcasts, des films, prendre du temps pour soi, être curieux, être créatif, apprendre une langue, cultiver l’amitié).